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13 juin 2008 5 13 /06 /juin /2008 00:09

Parlons maintenant de cette image de Gaston, qui est particulièrement réussie. Elle est au milieu de la planche 675, que l’on trouve dans le Géant de la gaffe.

 

Cette image est intéressante par son dynamisme, et reflète ce qu’on pourrait appeler la deuxième époque de Franquin. Le dessin est plus fouillé et nerveux que celui des années 50, et chaque image frappe par son énergie, mais il n’y a pas ce mouvement naïf qui emmène le lecteur d’une vignette à l’autre. Le plaisir de regarder est différent, et tourne autour de la recherche des gags, qui sont multiples, ou de la contemplation de certains détails particulièrement réussis du dessin.

 

Il existe beaucoup d’autres pages dans lesquelles Franquin exploite les possibilités humoristiques du football.  Regardons la planche 3 de Modeste et Pompon, qui date de 1955.

 

Modeste traverse le terrain en contrôlant avec le ballon, et Franquin représente tout cela avec un simple mouvement linéaire. Les jongleries de Modeste me semblent peu réalistes et moins convaincantes que les déplacements de Valentin Mollet, mais ce n’est manifestement pas la préoccupation du dessinateur. Ce qui compte, c’est le gag final.

 

Franquin a souvent été inspiré par le football, et particulièrement avec Gaston. Voici par exemple une partie de la planche 789, publiée en 1973.

 

Chaque dessin est détaillé de façon minutieuse, et l’auteur multiplie les détails bien observés. L’humour est présent à chaque vignette, de façon verbale bien sûr, mais aussi visuelle (j’adore les canards qui barbotent dans la mare à côté de Gaston). Le gag final est assez fin, mais le football n’est devenu qu’un prétexte. Cette page met en scène le petit monde de la rédaction Dupuis, et le terrain de football n’est qu’un lieu parmi d’autres pour développer un comique de situation. Le sujet principal est l'affrontement permanent entre Gaston et le monde réel.
 

Dans la planche n° 740, publiée en 1972, Gaston est à nouveau le gardien de l’équipe. Cette position plait manifestement à Franquin qui peut imaginer de multiples catastrophes. Les coéquipiers sont d’emblée inquiets.

 

Contrairement à l’exemple précédent, Gaston commet une vraie gaffe. Il se met à cuisiner à côté de ses buts (d’ailleurs, ce n’est peut être pas mauvais, le cabillaud à l’ananas …) et puis il oublie son réchaud qui finit pas dégager une épaisse fumée.

J’avoue que le gag ne m’avait pas fait rire lors de sa sortie dans le journal Spirou, mais à la relecture, il est plutôt savoureux. C’est d’ailleurs une des caractéristiques de l’humour de Franquin que d’éviter les gags prévisibles. Le dessinateur imagine souvent une issue improbable, voir même grotesque, et l’humour naît de la disproportion entre la cause et les effets, en s'accompagnant souvent d'une certaine poésie.

 

Parfois, les gags sont plus simples, en particulier dans les chroniques de la rédaction (qui sont généralement écrites par Delporte). C’est ainsi qu’en 1972, dans le numéro 1808 du journal Spirou, Franquin dessine quelques belles illustrations pour Un match qui nous a marqué. Gaston y est bien sûr gardien de but, et la punition est cette fois sévère pour son équipe qui perd par 15 à 1 (Prunelle étant expulsé après avoir boxé son propre gardien). Au départ, Gaston a des problèmes de casquette.

 

Puis la pluie se met à tomber, et Gaston ouvre tout naturellement son parapluie.

Relevons qu’il ne prend pas de but dans cette position, et qu’il arrête même le ballon avec son parapluie. L’arbitre décide toutefois que le ballon a été arrêté irrégulièrement, et accorde un penalty à l’équipe adverse.

 

Par la suite, les gags se succèdent, mais ils ne sont pas tous dessinés par Franquin. On retrouve une belle image de tir au but, alors que Gaston essaie d’attraper sa casquette emportée par le vent.

 

Toutefois, dans cette simple suite de gags, le football n’est plus qu’un moyen utilitaire parmi d’autres. Au fonds, la période Gaston ne me fait pas oublier les images bondissantes et naïves de Spirou, ni le plaisir simple qu’elles procurent. Lorsqu'il faut évoquer le génie de Franquin, je reviens toujours à cette magnifique planche des Voleurs du marsupilami.

 

A la fin de tout cela, il me reste la question brûlante de départ (qui je le reconnais ne doit pas passionner les foules) : Franquin aimait-il le football ? Le dessinateur n’a jamais répondu à la question, mais j’ai peine à croire qu’il ait pu représenter la véracité de ces situations sans avoir puisé dans une expérience personnelle. Le football est devenu le sport vedette de toute la planète, et personne n’échappe à ce phénomène. Franquin, en véritable artiste, nous a restitué cet univers sportif avec fraîcheur et authenticité.

 

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